Colin bagnard ou Colin braillard ?

Bon, ma camarade Sophie arrivera bien un jour à utiliser la fonction « auteur » ;-). Mais en attendant, elle à tout de même des choses à dire : 

Le 9 juin se déroulait la marche des femmes contre l’austérité. A cette occasion, le réseau Colin bagnard a contacté l’organisation de la manifestation en arguant du fait que ce réseau se battait pour les mêmes causes que les femmes : «dénoncer le syndrome de l’aliénation familial».
Alors que l’organisation de la marche avait choisit le 9 juin, sans symbole particulier, pour affirmer le manque d’audace du « changement » annoncé par F. Hollande et le la majorité du PS, le réseau Colin bagnard avait choisi cette date parce que c’était une semaine avant… la fête des pères.

Le premier constat est que ce réseau ne savait pas pourquoi les femmes descendaient dans la rue ce 9 juin. Il s’agissait pour Les femmes contre l’austérité de dénoncer la politique «de rigueur» relayée par le gouvernement. Elles revendiquaient des mesures concrètes pour l’égalité femme/homme, l’augmentation des salaires, l’interdiction des temps partiels… mais certainement pas l’égalité parentale telle qu’elle est revendiquée par ce réseau Colin bagnard, voir ici.

Le blog de l’association est très intéressant puisque l’on peut voir que le réseau Colin bagnard (RCB) espère la participation de SOS PAPA, mais aussi les pères perchés sur leurs grues du « collectif de la grue jaune » ou encore leurs tours des cathédrales d’Orléans. Je me rappelle comment les médias ont traité avec un « recul et un travail d’investigation exemplaire » ce fait divers, présentant le père comme une victime de la décision inique d’UNE juge aux affaires familiales et victime de cette société « féminisée » (enfin lui a dit de « bonnes femmes »), qui privilégie toujours les femmes, surtout dans les cas de divorces.

Ce discours fait écho à la prose d’Alain Soral dans son livre Vers la féminisation ? : Démontage d’un complot antidémocratique, merveilleusement plagié (il parait que non. Mais avec l’autorisation de Soral. Mais que non. Enfin bref…) par E. Zemmour (ici, ici ou , une série de vidéos sur les propos zemmouriens).

Le 9 juin le RCB contre le mariage homosexuel a donc défilé pour l’égalité parentale (ici leur pétition) mais aussi contre le syndrome de l’aliénation parentale (SAP) concept inventé par un psychiatre, Richard Gardner en 1985, et qui n’a jamais été soumis à évaluation par ses pairs, voir même par le monde médical. Et donc pas recensé comme maladie psychiatrique, mais défini par Richard Gardner comme « Un trouble de l’enfance qui survient presque exclusivement dans un contexte de dispute concernant le droit de garde de l’enfant. L’enfant l’exprime initialement par une campagne de dénigrement à l’encontre d’un parent, cette campagne ne reposant sur aucune justification. Le SAP résulte de la combinaison de la programmation du parent endoctrinant (lavage de cerveau) et de la propre contribution de l’enfant à la diffamation du parent cible. Lorsqu’un abus et/ou une négligence parentale existent vraiment, l’animosité de l’enfant se justifie et ainsi l’explication de comportement par le syndrome d’aliénation parentale ne s’applique pas » voir ici.

Le RCB et ses amis fait sienne cette « théorie » dénonçant la féminisation de la société. Société qui par ailleurs nierait les violences conjugales faites aux hommes. En effet les masculinistes soutiennent qu’il existe une symétrie de la violence et les hommes seraient les perdants d’une guerre des sexes menées par les féministes. Et l’une des violences psychologiques infligées par les femmes seraient le divorce… car il aurait un impact psychologique plus lourd pour les hommes que pour les femmes, qui dans la majorité des cas en sont les instigatrices. Par ce biais les femmes peuvent maintenant obtenir facilement la garde des enfants et s’approprier les biens du couple en faisant de fausses allégations (déclarations?) de violence conjugale et en prime utilise le SAP… Ainsi, dans cette lecture paranoïaque, les hommes sont « broyés » par un système qui présume de leur culpabilité avant même qu’ils aient ouvert la bouche.

Par ailleurs, on peut déplorer que les recherches sur le genre soit utilisées pour tout et n’importe quoi, comme on a pu l’observer, ces derniers mois, et particulièrement lors des manifestations anti-Mariage pour tous, par les droites conservatrices radicalisées et les extrêmes-droites, pour dénoncer une politique matriarcale imposée aux hommes depuis des milliers d’années (sic!).

Mais ce que prétendent ne pas savoir les masculinistes, c’est que les théories féministes soutiennent globalement que la violence conjugale est exercée principalement par les hommes contre les femmes, que certaines femmes emploient la violence dans un cadre de légitime défense mais aussi que la violence des femmes contre les hommes en dehors de ce cadre défensif constitue un phénomène marginal…

Et, histoire de remettre les pendules à l’heure rappelons que si beaucoup de femmes sont des juges aux affaires familiales (JAF), c’est aussi parce-qu’il y a des secteurs plus féminisés dans la justice, comme dans la santé, l’enseignement… Bref, tout cela renvoie à une division sexuelle et sociale du travail sur laquelle bien peu se penche (voir tout de même le travail de chercheuses du CNRS ici). Rappelons aussi que, pour autant, les lois restent les même pour tous. Allez un dernier petit lien mais cette fois pour remettre à plat la réalité des chiffres.

Sophie Joubert

A propos André Déchot

Ancien animateur de la commission Europe du réseau antifasciste Ras l'front et ex-membre du groupe de travail « extrêmes droites » de la Ligue des droits de l'Homme (LDH), de son comité central et de son bureau national, j'ai également commis avec mes partenaires Jean-Paul Gautier et Michel Briganti l'ouvrage « La galaxie Dieudonné - Pour en finir avec les impostures » édité aux éditions Syllepse en 2011.
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